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L’histoire peut prêter à sourire en elle même. Le 3 août un transporteur doit livrer 31 rats vivants pour pratiquer des tests médicaux. A l’arrivée, le destinataire prend en charge la livraison et constate oh malheur que les rats sont tous morts, probablement en raison d’une mauvaise climatisation du véhicule. Mais le conducteur refuse de constater le décès des rats et encore moins de les ramener. Il repart sans constatations expresses du destinataire qui s’en va se plaindre immédiatement auprès de l’expéditeur. Ce dernier téléphone, puis envoie un mail au transporteur pour demander la prise en charge des formalités d’assurance et exige la courbe de température.

Et c’est là que notre expéditeur commet une erreur fatale : il attend les 7 et 10 août pour faire une protestation motivée par RAR, soit plus de 3 jours francs et ouvrables après la livraison. Les négociations s’enlisent et l’expéditeur assigne le transporteur devant le tribunal de commerce de Bobigny. Ce dernier donne raison à l’expéditeur et condamne le transporteur à verser l’intégralité du préjudice.

Le transporteur fait appel en arguant la forclusion : en l’absence d’une protestation par lettre RAR (L 133-3 C Commerce) ou expertise (L 133-4) dans les 3j francs et ouvrables qui suivent la livraison, tout recours devient impossible.

Et bien lui en prend puisque la cour d’Appel de Paris lui a logiquement donné raison (29/11).


Les arguments invoqués par la Cour sont imparables :

- La mort de rats s’assimile à une avarie totale et non à une perte totale (qui dit perte dit le fait que la marchandise n’a jamais été livrée ce qui n’est pas le cas ici). Le destinataire doit donc se soumettre aux formalités de l’art L 133-3 du code de Commerce, le délai commençant à la prise en charge de la marchandise (même inutilisable!).

- Un coup de fil, comme un mail ne suffisent bien évidemment pas à interrompre cette satanée forclusion.

- Le 7 c’est le quatrième jour franc et ouvrable qui suit la livraison. Le courrier RAR est donc trop tardif.

- Aucune demande d’expertise n’a été faite.

- Le fait que le transporteur ait commis une faute évidente (le mauvais réglage de la climatisation est très probablement à l’origine de la mort des rats) ne dispense pas le destinataire de faire la démarche de protestation.

-Enfin, si des réserves précises et circonstanciées et acceptées par le transporteur (le conducteur) avaient été faites à réception, il est aujourd’hui acquis qu’elles auraient pu dispenser le destinataire de faire la démarche. Mais dans le cas présent, pas de réserves à réception et de surcroît le conducteur édicte ses propres réserves en refusant de constater la mort des rats et de les reprendre (attitude prudente et en l’occurrence salutaire, le conducteur ne s’estimant pas expert en rongeurs).

Conclusion : l’action contre le transporteur est donc définitivement éteinte. Cet arrêt vient rappeler si besoin il en était, l’importance des réserves à réception quand bien même la faute du transporteur s’avère flagrante.

(vu dans l’excellent Bulletin des Transports et de la Logistique n°3716)